• 35 ANS DANS LES GEOLES AMERICAINES :
    SOLIDARITE AVEC MUMIA ABU-JAMAL !!

     

    Alors que certains beaux esprits s’émeuvent de l’élection du républicain Donald Trump nous n’oublions pas, quant à nous, la réalité historique de la démocratie américaine, à savoir plusieurs siècles de violences policières et étatiques. Nous n’oublions pas que cette « vénérable démocratie » a systématiquement, méthodiquement, recouru à la violence, y compris hors de tout cadre légal, dès lors que les intérêts supérieurs du capital étaient menacés, contestés de manière radicale. Ainsi, sans réaliser ici un inventaire exhaustif de tous les crimes étatiques qui jalonnent la fondation de la nation américaine, nous pouvons rappeler que dès la première partie du XXème siècle, le syndicat Industrial Workers of the World (I.W.W.)(1), qui commit le crime de s’opposer à la guerre de 1914, refusant de participer à une guerre de rapines orchestrée par des pays impérialistes, fût l’objet d’une campagne idéologique de la part du pouvoir, prélude à une offensive de destruction physique. Une campagne hystérique comme l’exprimait l’éditorial d’un journal de l’Oklahoma, le Daily World, dont le titre est expressif : « Sortez les cordes de chanvre ! ». Un article qui était un appel au meurtre comme en témoigne cet extrait « … Le premier pas, pour battre l’Allemagne, consiste à étrangler les I.W.W. Il faut les tuer comme on tuerait toute autre sorte de serpent. Il ne suffit pas de les réprimer, il faut les éliminer… Tout ce qu’il faut ce sont des preuves et un peloton d’exécution… » (2). Cette littérature nauséabonde lançait la meute et les pires exactions s’ensuivirent : perquisitions, arrestations massives, pillage de locaux, faux témoignages, condamnations arbitraires. L’exécution le 19 novembre 1915 de Joe Hill (3), à Sacramento dans l’Utah, après un procès truqué, était un signe avant-coureur de cette répression. Au XXème siècle la longue route du capitalisme américain est jonchée de cadavres sacrifiés et d’incarcérations pour la défense du capital : Sacco et Vanzetti (4), Ethel et Julius Rosenberg(5), victimes du maccarthysme(6), combattants de l’American Indian Movement(7). A la fin des années 60 et au cours de la décennie suivante c’est dans la lutte contre le mouvement noir américain que le FBI révèlera une nouvelle fois sa fonction profonde, celle de chien de garde d’une société fondée sur l’exploitation et l’oppression.


    L’émergence du Black Panther Pary (B.P.P) ou quand la révolte noire prend les armes.

    Le mouvement noir américain a connu plusieurs phases dans son combat contre la ségrégation raciale et pour l’égalité des droits, combat qui en 2016 demeure d’actualité. A la fin des années 60 après l’assassinat de Martin Luther King le 4 avril 1968 à Memphis, figure de proue du mouvement pour la reconnaissance de droits civiques pour la population noire, et non-violent, la jeunesse noire révoltée opte pour une nouvelle orientation et s’inspire des luttes révolutionnaires anticoloniales qui secouent la planète. C’est dans ces conditions que le Black Panther Party for Self-Defense, créé le 15 octobre 1966 à Oakland en Californie par Bobby Seale(8) et Huey Newton(9), connaît un développement rapide. Cette organisation politique puise notamment ses orientations dans les écrits de Frantz Fanon (10) qui a publié en 1966 « Les Damnés de la terre », ouvrage dans lequel il légitimise le recours à la violence révolutionnaire. Le B.P.P. revendique et pratique l’armement de ses membres dans un but d’auto-défense face aux agressions de racistes blancs et face à la police. En 1968 un de ces dirigeants exprime en ces termes ce positionnement « … Huey Newton est le descendant de Malcom X (11). Celui-ci a prédit l’avènement du fusil dans la libération des Noirs. Huey P. Newton l’a ramassé, a appuyé sur la gâchette… ». Mais ce qui rend populaire ce mouvement c’est également le travail militant concret effectué dans les quartiers pauvres, dans les ghettos, activités qui portent sur la nourriture, la santé et l’éducation. Autre élément qui témoigne de la dangerosité de cette organisation, la volonté de tisser des liens de combat avec la nouvelle génération des jeunes blancs, démarche inquiétante sur un continent toujours pollué par le ségrégationnisme. Le B.P.P devient alors une cible, à éliminer.

    Un programme secret du FBI pour maintenir l’ordre social et politique existant.

    La démocratie américaine montre une nouvelle fois son véritable visage. Une note du FBI de 1968 est explicite « …il faut faire comprendre aux jeunes noirs modérés que, s’ils succombent à l’enseignement révolutionnaire, ils seront des révolutionnaires morts… ».C’est seulement en 1971 qu’une action d’activistes révélera l’utilisation d’une programme secret de la police fédérale contre le FBI. En 1956 avait été monté le COINTELPRO (Counter Intelligence Program) pour lutter contre le Parti Communiste aux USA et c’est ce plan qui est réactivé en 1967 pour traquer les membres du BPP. L’objectif est clair « …maintenir l’ordre social et politique existant… », tous les moyens sont bons y compris l’assassinat. Pour le patron du FBI en 1969 le B.P.P. est « … la plus grande menace pour la sécurité intérieure du pays… ». A partir de là la police va utiliser tous les moyens pour détruire le B.P.P. : mises sur écoutes, courriers interceptés, infiltrations, traques, discrédits, saccages de locaux, arrestations, assassinats. Seule la remise en perspective de l’action du FBI à l’époque permet de comprendre l’acharnement judiciaire contre Mumia Abu-Jamal depuis 35 ans.

    Mumia Abu-jamal victime de la répression policière et de l’acharnement judiciaire.

    C’est il y a 35 ans, le 9 décembre 1981 que grièvement blessé, Mumia est arrêté à la suite d’une altercation au cours de laquelle un policier a été tué. Victime d’un procès à charge Mumia est d’abord coupable d’avoir été membre des B.P.P., chargé de l’information à la section de Philadelphie. Puis devenu journaliste radio il présente régulièrement des chroniques à fortes connotations sociales, élément pour lequel il sera licencié et deviendra chauffeur de taxi. Il est alors également dans le collimateur du FBI pour ses sympathies pour l’organisation MOVE(12), structure écologique, anti-violente et anticapitaliste du Black Power (13). De nombreuses organisations ont demandé une révision de son procès. Sa condamnation à mort a été commuée en emprisonnement à vie sans possibilité de remise de peine. Cet acharnement trouve sa source dans le combat de classe que mènent les autorités américaines contre ceux et celles qui contestent les fondements du capitalisme.

    Pour sa défense, pour sa santé : soutien financier à Mumia Abu-Jamal.

    Mumia poursuit depuis sa prison son travail de journaliste en intervenant sur Prison Radio. Atteint d’hépatite C Mumia est victime de cette maladie qui fait des ravages aux Etats-Unis car le coût des soins est de 80 000 dollars. Dans les prisons une grande partie des malades n’est pas soignée. Le collectif de soutien en France organise la collecte d’argent pour que Mumia Abu-Jamal puisse se soigner. Les fonds récoltés servent également pour sa défense judiciaire.

    Dernière minute : en appel, le 3 janvier 2017 la justice américaine met en demeure l’administration pénitentiaire de Pennsylvanie de soigner Mumia Abu Jamal.
    Notre solidarité est plus forte que la volonté de liquidation de la police fédérale américaine. Solidarity avec Mumia.

    Solidarité Financière : mode d’emploi.
    Envoyer vos dons à Collectif Unitaire National de Soutien à Mumia Abu-Jamal, 43 boulevard de Magenta 75010 Paris. Chèque à l’ordre de « MRAP solidarité Mumia ».
    Pour contacter le collectif français « Libérons Mumia » écrire :
    Collectif Unitaire National de Soutien à Mumia Abu-Jamal
    MEMBRE DE LA COALITION MONDIALE CONTRE LA PEINE DE MORT
    43, boulevard de Magenta 75010 Paris - TEL : 01 53 38 99 99 –
    E MAIL : contact@mumiabujamal.com
    http://www.mumiabujamal.co

    Ecrire à Mumia Abu-Jamal
    Ecrivez en anglais ou en français mais en caractères d'imprimerie. Puis glissez votre courrier ou une carte postale de votre région dans une enveloppe blanche. N'oubliez pas de mentionner votre adresse - toujours en caractères d'imprimerie - au dos de l'enveloppe. Affranchissez votre envoi postal : 1,30 € jusqu'à 20 grammes. Censure possible.
    MUMIA ABU JAMAL
    AM - 8335
    SCI Mahanoy
    301 Morea Road
    Frackville, PA 17932
    USA


    Notes :
    1 : I.W.W. : Organisation syndicaliste révolutionnaire américaine, adepte de la grève générale.
    2 : Joyce Kornbluh « Wobbies & Hobos- Les I.W.W. Agitateurs itinérants aux Etats-Unis-1905-1919. Editions L’Insomniaque ».
    3 : Joe Hill : militant des I.W.W., fusillé le 19 nombre 1915 à la suite d’un procès controversé l’accusant de meurtre.
    4 : Sacco et Vanzetti, militants anarchistes d’origine italienne, exécutés dans la nuit du 22 au 23 août 1927 pour le meurtre supposé de deux convoyeurs de fonds, à la suite d’une mascarade de procès. Une immense campagne internationale de soutien n’a pu empêcher leur exécution.
    5 : Ethel et Julius Rosenberg, Arrêtés et condamnés à mort pour espionnage au profit de l4union Soviétique ils sont exécutés le 19 Juin 1953 à la prison de Sin Sing.
    6 : Le maccarthysme caractérise une période allant de 1950 à 1954, caractérisée par une chasse aux sorcières contre toute personne soupçonnée de sympathie pour le communisme. Des procès, l’exclusion de l’administration, l’interdiction pour des acteurs de travailler, pour des auteurs de publier. Du nom du sénateur McCarthy.
    7 : Organisation née en 1969 qui revendique les droits civiques pour la communauté amérindienne, une reconnaissance culturelle et religieuse et le refus de l’exode dans les villes. Le fait d’armes de ce mouvement a lieu le 27 février 1973 où 200 amérindiens occupent, armes à la main, le comptoir d’échanges de Wounded Knee dans de Dakota du Sud. Lieu symbolique où furent massacrés en décembre 1891 300 indiens sioux. Leonard Peltier condamné à la prison à perpétuité appartenait à l’AIM. Ce mouvement sera durant de longues années harcelé par le FBI.
    8 : Bobby Seale, fondateur de B.P.P., né en 1936, activiste politique.
    9 : Huey Percy Newton, co-fondateur des B.P.P., marxiste, se réfère à Frantz Fanon, Mao Tse Toung et aux luttes anticoloniales. Assassiné le 22 août 1989.
    10 : Frantz Fanon, né le 20 juillet 1925 à Fort de France- Mort le 6 décembre 1961. Psychiatre, essayiste, militant anticolonialiste, soutien de la révolution algérienne. Figure parmi les théoriciens du tiers-mondisme. Ses écrits : « Les damnés de la terre » et « peau noire, masques blancs » ont influencé une génération de militants/es anticolonialistes
    11 : Malcom X, né le 19 mai 1925, assassiné à Harlem le 21 février 1965, militant des droits civiques, membre de la « Nation of Islam ». Derrière son assassinat hypothèse des Black Muslims et possibilité d’une infiltration de cette organisation par le FBI.
    12 : MOVE, groupe politique lié au Black Power, dont les membres étaient des végétaliens et des partisans passionnés du droit des animaux. Fondé en 1972. Lors de la perquisition de leur domicile en 1978 un policier a trouvé la mort. En 1985 la police a lâché une bombe sur leur maison à partir d’un hélicoptère tuant 11 personnes dont 5 enfants.
    13 : Black Power, concept qui regroupe différentes structures de lutte pour les droits civiques et contre les discriminations raciales, certaines comme les Black Muslims étant fermées aux Blancs.


  • Oui à l’urgence d’une nouvelle ouverture d’hébergement

    (communiqué de la Ligue des droits de l'Homme du Rhône)

     

    Qu’un seul être humain soit privé d’un toit sur sa tête est déjà scandaleux. C’est en éprouvant les rigueurs de cet hiver qu’on s’en rend compte …comme chaque hiver malheureusement. Combien de femmes, d’enfants, d’hommes sont dans nos rues, et vivent dans des abris de fortune, en France, sixième puissance mondiale, Patrie des droits de l’Homme ? Chacun d’entre nous, suite à un revers de destin peut se retrouver dans cette situation, vivre dehors… la moitié des personnes qui n’ont plus de domicile seraient en mauvaise santé …. Nous rendons-nous compte que nous parlons là, d’êtres humains ?
    La collectivité publique augmente-t-elle suffisamment le nombre de places en hébergement d’urgence ? Que fait-elle pour éviter cette gestion « au thermomètre » et mettre en place une véritable politique sociale inclusive ? Lorsqu’on sait que l’INSEE en septembre 2016 a dénombré l’existence de plus de 26 000 logements vacants dans la ville ! La réponse est sans conteste : évidemment NON !
    Face à cette tragédie qui s’éternise, la Ligue des droits de l’Homme ne saurait se contenter de l’ouverture de gymnases pour accueillir dans l’urgence. Elle s’insurge d’entendre des paroles satisfaites nous expliquant qu’il n’est pas nécessaire d’ouvrir un nouveau lieu d’hébergement d‘urgence puisqu’il reste 30 places disponibles … Alors que nous savons tous, avec les personnels de l’Urgence Sociale, qu’il reste plus de 2 000 personnes dans la rue … Ce qui, moralement, est totalement inadmissible.


    Présidente de la Fédération du Rhône de la Ligue des droits de l'Homme: Alexandra Valette


  • Loi travail ne baissons pas les bras!

     

    En 2016 nous avons perdu la lutte frontale. Il nous reste la guerrilla!

    La loi EL Khomri comporte de nombreuses dispositions en contradiction avec les textes fondamentaux et internationaux. Voir dans la rubrique juridique une liste de quelques exemples de recours possibles


  • Familles sans logement : rassemblement le 5 janvier devant les locaux de l’OFII, centre de rétention qui ne dit pas son nom

     

    Pour dénoncer les pressions de la préfecture sur des familles sans logement, pour le droit inconditionnel au logement pour les élèves de l’agglomération lyonnaise et leurs familles…
    Le collectif « Jamais sans toit », qui réunit des enseignants, des parents d’élèves et des habitants riverains d’école, appelle à un rassemblement le jeudi 5 janvier à 18h au 22 rue de l’Effort (Lyon 7, métro Debourg) devant les locaux de l’Office Français de l’immigration et de l’intégration (OFII). Ces locaux sont en effet en train de devenir un centre de rétention qui ne dit pas son nom.
    En effet, si l’on peut se féliciter que les nombreuses mobilisations dans les écoles et collèges de l’agglomération aient permis à environ cinquante élèves et leurs familles d’être mise à l’abri par les services de la préfecture, nous avons appris avec dégoût que certaines d’entre elles subissent un chantage de la part des services de la préfecture : une mise à l’abri temporaire contre une signature pour un retour au pays ; et en cas de refus c’est un retour à la rue ! C’est notamment le cas des familles hébergées dans ces locaux de l’OFII, situés au 22 rue de l’Effort. Dans ces locaux, des familles ont même été assignées à résidence avec obligation de pointer au commissariat deux fois par semaine.
    Nous dénonçons donc fermement ce chantage abject et affirmons que chaque enfant doit pouvoir suivre une scolarité digne, profitable et sans vivre le traumatisme d’une vie dehors ou d’une reconduite forcée dans un pays qu’il ne connait souvent pas.
    Le collectif Jamais sans toit tient également à rappeler et dénoncer que plus de 100 élèves de l’agglomération lyonnaise (et leurs familles) n’ont toujours pas été hébergés et dorment encore dehors et cela, alors même que le plan d’hébergement d’urgence est activé depuis plus de deux mois et que les températures sont au plus bas !
    Le collectif « Jamais sans toit » demande donc à nouveau au préfet que la loi soit appliquée et rappelle que l’hébergement est un droit inconditionnel pour tous.
    (Code de l’action sociale des familles art 3452-2).


  • Mix et remix dessinateur auquel on aimait bien piquer des dessins à l'occasion est mort le lundi 19 décembre à l'âge de 58 ans.

     



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    Campagne BDS

     

     

       

     

            


  • La gratuité:« Une expérience de solidarité qui donne le goût de transformer la société »

     

      Entretien avec Jean-Louis Sagot-Duvauroux réalisé par I. D. pour le journal L’Humanité le lundi 30 Décembre, 2013


    Philosophe et écrivain, Jean-Louis Sagot-Duvauroux développe l’idée d’un nouveau rapport au tout-marchand, passant par des initiatives locales inédites et probantes.
    Jean-Louis Sagot-Duvauroux est un des premiers à avoir ouvert le débat sur la gratuité, avec son livre Pour la gratuité, en 1995. Avec Magali Giovannangeli, présidente de la communauté d’agglomération du Pays d’Aubagne et de l’Étoile, il a coécrit Voyageurs sans ticket, liberté, égalité, gratuité (1).


    En 2009, lorsque la ville d’Aubagne a lancé la gratuité des bus, elle s’est heurtée au scepticisme. Comment l’expliquer ?
    Jean-Louis Sagot-Duvauroux: Faire advenir une idée nouvelle provoque du débat. Tant mieux. Depuis quatre ans, l’expérience a prouvé son efficacité sociale, économique, écologique, humaine. La gratuité de tout est sans doute une chimère, mais un certain nombre de besoins essentiels de l’être humain, comme la santé, l’éducation, les déplacements ou l’eau, peuvent être, sont déjà, par endroits ou en partie, rendus libres d’accès pour tous. Dans les bus d’Aubagne, le chômeur et le notaire sont égaux. Là, l’égalité devient concrète. C’est rare et précieux. Créer des espaces publics où chacun est à égalité sans considération de revenus, c’est une invention politique très désirable et qui peut faire école.
    Quelle est votre définition 
de la gratuité ?
    Jean-Louis Sagot-Duvauroux: Ce qui est libre d’accès, ce qui ne dépend pas de ce que nous avons dans la poche. La gratuité est une alternative à la façon marchande d’accéder à un bien, soit par la profusion de la nature, par exemple la lumière du soleil, soit par des inventions politiques comme la Sécurité sociale ou l’école gratuite. Ces politiques ont un coût. Mais la révolution est ailleurs. Elle se niche dans la nature de l’accès au bien concerné. Avec la gratuité, c’est « à chacun selon ses besoins » et non plus « à chacun selon ses moyens ». D’une certaine manière, le gratuit est l’axe de notre vie. Une partie de notre temps est vendue sous forme de force de travail. L’autre partie est sans prix. Pour tout le monde, ce qui est sans prix prime sur ce qui est évaluable monétairement. L’amour de nos enfants est plus important que le chariot du supermarché. L’illusion d’optique liée à l’emprise du marché sur les esprits nous empêche d’en être conscients.
    La liberté que procure la gratuité serait-elle aux avant-postes de la question politique ?
    Jean-Louis Sagot-Duvauroux: L’émancipation humaine, c’est-à-dire la liberté en marche, est le fondement du projet communiste initial. La gratuité émancipe du marché et du « chacun pour soi » qu’il porte en lui. Elle émancipe aussi du contrôle policier qui devient inutile. Les anciens communistes parlaient de « dépérissement de l’État ». Pour la doctrine libérale, le maximum de liberté a été atteint grâce au « libre » marché, à la « libre » entreprise, à l’État représentatif, à la consommation comme clef du bien-être, au modèle occidental. Or il existe, dans beaucoup de domaines, souvent localement, des expériences qui s’affranchissent de ce bornage. Dans la région parisienne, la répression très spectaculaire de la « fraude » dans les transports en commun est sans doute la forme la plus prégnante de l’intimidation policière des couches populaires, principalement des jeunes et, parmi eux, de nos jeunes compatriotes noirs ou arabes. Pourquoi ne pas permettre partout et par principe aux moins de vingt-cinq ans de circuler gratuitement ? Ils paieront bien nos retraites. Voilà une vraie revendication populaire alternative. Déjà, on a constaté que l’abolition du zonage le week-end avait fait diminuer les tensions à la gare du Nord, porte d’entrée de la capitale pour les quartiers les plus populaires d’Île-de-France.
    D’après vous, l’idée de gratuité 
est-elle révolutionnaire ?
    Jean-Louis Sagot-Duvauroux. C’est une expérience de solidarité qui donne le goût de transformer la société. Les tenants du capitalisme nous rabâchent que l’homme ne fonctionne qu’à la cupidité. Faux ! On sait très bien fonctionner aussi à la solidarité. Le problème est que l’argent, invention humaine, est devenu leur maître. La gratuité montre qu’on peut remettre l’argent à sa place, bon esclave, mauvais maître. Les forces qui se recommandent d’une alternative au libéralisme gagneraient à faire l’inventaire des expériences qui ont franchi les frontières dans lesquelles le système enferme la liberté. La gratuité en fait partie. Cet inventaire ouvrirait l’action sur des perspectives politiques et idéologiques moins dépressives que la récrimination contre le malheur des temps.

    (1) Éditions Au Diable Vauvert, 2012.

    voir aussi la rubrique gratuité

     

     





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